En dépit des mises en garde répétées du Conseil de Sécurité des Nations Unies, géniteur de la Résolution 2348 consacrant l’Accord du 31 décembre 2017 comme l’unique source de légitimité des institutions de la RDC et de leurs animateurs pendant une transition qui ne devrait pas excéder 12 mois, les hommes au pouvoir à Kinshasa ont clairement opté pour un nouveau « glissement » du calendrier électoral. Et pour ne pas trop s’exposer, ils ont préféré confier la manoeuvre à la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante).
Et cette dernière, après avoir longtemps donné l’impression de s’activer pour le nettoyage du fichier électoral, notamment à travers les opérations d’enrôlement des électeurs, est occupée à « habiller » l’annonce d’un nouveau calendrier électoral. Dans cet exercice, qui ne sera sans doute pas aisé en raison du tollé que le non-respect de l’Accord de la Saint Sylvestre est en train de susciter au pays comme en dehors de ses frontières, la centrale électorale a trouvé comme principaux appuis le gouvernement congolais et le CNSA (Conseil National de Suivi de l’Accord du 31 décembre 2017), une institution
d’appui à la démocratie jusque-là sans existence légale, car
fonctionnant sans la loi organique devant porter sur son organisation.
Pas du tout dupes, des millions de Congolaises et Congolais, ceux
vivant au pays comme leurs compatriotes de la diaspora, ne se font
guère d’illusion au sujet des conclusions qui vont résulter de
l’évaluation du processus électoral au niveau de la tripartite
Gouvernement- CNSA-Ceni. Sans surprise, la CENI va annoncer à la
communauté nationale ce que l’on sait depuis 2015, après le
remplacement de feu Abbé Malumalu par Corneille Nangaa à sa tête, à
savoir l’impossibilité technique d’organiser les élections en 2017.
A dire vrai, cette institution d’appui à la démocratie n’a rien fait
pour vaincre les contraintes techniques. Au contraire, elle les a
multipliées en se dotant d’un minimum de kits de saisies et
d’impression des données, obligeant les candidats à l’enrôlement à
passer des journées entières, à Kinshasa et en provinces, devant les
locaux de ses antennes, pour l’acquisition des cartes d’électeurs.
Pannes récurrentes d’ordinateurs et de groupes électrogènes, ruptures
régulières de stocks de papiers, épuisement d’encre dans les
cartouches, coupures intempestives de courant, vols inexpliqués des
kits dans des sites pourtant placés sous haute surveillance policière,
non-paiement chronique du personnel d’appoint et suspensions à
répétition des opérations d’enrôlement…étaient autant de contraintes
fabriquées de toutes pièces pour retarder le processus électoral.
Il y a aussi la troublante décision de suspension des opérations
électorales au Kasai, à cause de l’insécurité alors que la CENI avait
procédé à l’enrôlement des électeurs, sans poser le moindre préalable,
en Ituri, au Nord-Kivu, au Sud-Kivu, au Tanganyika, à Kinshasa et
ailleurs où les forces négatives s’illustrent tous les jours par des
pillages, des tueries, des viols et des vols. Le prétexte sécuritaire
pour ne pas enrôler au Kasai n’avait aucun fondement, quand on se
souvient qu’en 2006 comme en 2011, la Ceni ne s’était posé aucune
question pour délivrer des cartes d’électeurs même aux étrangers au
Nord-Kivu et au Sud-Kivu, où l’insécurité bat son plein depuis 1994,
soit 23 ans.
A quand les élections ?
Si la CENI peut se féliciter, aujourd’hui, d’avoir réussi son coup
consistant à ne pas toiletter le fichier électoral dans un délai
compatible avec la tenue des élections en 2017, il lui reste l’autre
paire de manche, à savoir la fixation d’une date précise pour
l’organisation, en une séquence, des élections présidentielle,
législatives nationales et provinciales, tel que voulu par les
signataires de l’Accord de la Saint Sylvestre.
Des millions de compatriotes désillusionnés en 2017, attendent la CENI
de pied ferme en 2018, pour savoir si le pouvoir en place à Kinshasa
est réellement animé de la volonté de conduire le peuple congolais aux
urnes. Car, quoi que fasse cette institution d’appui à la démocratie,
les « glissades » du calendrier électoral devraient, tôt ou tard,
s’arrêter.
Kimp